mardi 1 janvier 2013

Scène 24 - Helen of Troy

Après les bains, les massages, s’habiller s’effectue longuement dans sa cabine. Le calme en soi s’accorde à celui du vestiaire. Et par vestiaire, entendons-nous bien. C’est un très beau vestiaire. Le carrelage au sol est impeccable, chauffé. La lumière est tamisée, les cabines, comme les deux grands lavabos frontaux, sont idéalement proportionnés. L’espace offre à la fois aisance et intimité. Une dernière touche de raffinement à laquelle chaque client du salon à droit avant de repartir dans son quotidien sauvage. 

Aujourd’hui je ne suis pas seule à profiter de cette enceinte immaculée. La jeune fille asiatique que j’avais aperçue plus tôt dans la matinée est là. Vêtue d’un chemisier de soie clair, et d’une jupe bleu marine, elle est pieds nues sur le carrelage, concentrée sur ses dernières touches de mascara.
Je m’approche, et lui fait un léger signe de tête lorsqu’elle me repère dans le miroir à quelques pas derrière elle.
Devant la glace, je vérifie les ajustements de mon vêtement, je m’attarde inutilement sur des faux-plis. Puis je fouille sans arrêts dans ma sacoche de manière très impliquée.

Deux épingles tombent finalement au sol et mettent fin à ma combine innocente.  «  Désolée » lui dis-je en évitant son regard.

Je m’agenouille au sol et trouve la première épingle rapidement. J’inspecte alentours à tâtons pour trouver la seconde. Je m’aventure sous le comptoir où la lumière parvient plus faiblement. Une fois l’épingle retrouvée, je réalise avec émoi la faible distance qui me sépare des jambes nues de la jeune femme. Le sang reflue de mes mains, ma respiration se réduit à à quelques inspirations vitales. Un geste maladroit inévitable s’incruste dans ma pensée : je frôle sa jambe de ma main. La jeune fille ne bouge pas. L’ai-je fait ? l’ai-je touché ? Je crois que oui.

Un désir cinglé pour la courbe charnue de ses mollets remonte dans ma gorge. Dans le repli intime de son genou je glisse un peu de ma main. Puis je lève des yeux inquiets vers la jeune femme : hiératique, tournée vers le miroir, elle est immobile, éteinte et sous l’emprise de ce que lui renvoie son reflet.

Dans le silence qui m’absout je trace au doigt l’arc qui de la chaire bombée et tendre s’enracine vers le talon. Auprès de mon idole, de mon gibier consentant, je suis un païen comblé. Désir exalté et gratitude campent dans ma poitrine, contenus dans un chaos accablant.  Aussi chacun de mes baisers est d’abord estimé, aimé sur la peau miel et ronde. De ses genoux, je lèche la face à-pic qui part de ses rotules, j’embrasse les flancs, soupèse dans mes mains la force et la souplesse de l’axe complaisant.  Lorsque je retrousse un peu de sa jupe en remontant sur sa cuisse, ses muscles trahissent sa crispation. Je distille  quelques baisers amis avant de gagner la peau tendre du creux de ses cuisses. Là, nichée auprès des deux ornières aux parois fines, je convoite, je cajole, j’embrasse la cuisse entière. Au versant arrière, je chaparde un baiser à la naissance de ses fesses et amorce une descente de baisers et de caresses.  Ecrasée au niveau de ses jambes, je me surprends à mordiller, suçoter son tibia comme un chiot. Je m’arrête soudain et dépose sur ses pieds, deux baisers que je regarde intensément, comme si deux fleurs devaient y pousser.

Je me redresse sur mes genoux et regarde à nouveau le reflet de la jeune fille. Son visage tourné vers moi m’étudie durement.
Posant une main résolue sur le comptoir, elle lève alors son pied vers moi et le flanque sur ma poitrine à la lisière de mes seins. Poussant plus fort, je bascule tout à fait, dos sur le carrelage.
Son talon m’étrille alors. Il jauge puissamment ma résistance. Alors qu’à terre il me dépouille,  un éclat sombre fleurit dans mon cœur et m’enveloppe toute entière.
Toujours aidée par le comptoir, elle se plante alors en équilibre sur moi. Tendue sous son poids, je suis condamnée à quelques respirations impossibles. La jeune fille, absorbée par ma condition, me fixe comme un prédateur satisfait. Après quelques secondes de ce traitement, elle me piétine à petits pas. Dans le silence de la cabine je n’entends que le froissement de sa jupe, et mes murmures tremblants.