lundi 25 mars 2013

Scène 26 - Le Matin de Vénus ( partie II )

Parce qu'elle chérissait cette nuit, elle m'a demandé d'attendre, de commencer une heure avant l'aube. C'est donc un peu avant l'heure bleue, alors qu'elle dormait d'un sommeil d'ange, que j'ai commencé à nouer ses chevilles aux deux bords du lit. Elle s'est réveillée paisiblement, lorsque j'ai attrapé son poignet pour l'enrouler dans la corde. Sa respiration était calme. Son corps baignait encore dans cette chaleur douce du sommeil. Elle regardait dans le vague et parfois me suivait dans mes préparatifs, du coin de l'œil. 

Ouverte à moi sur le lit, son dos déployé, je me suis postée sur ses fesses, je lui ai dit de boire l'alcool de riz. 
Elle grimaçait de dégoûts. J'ai alors bloqué sa tête vers l'arrière en empoignant sa mâchoire et sa gorge, et j'ai déversé un peu de vin entre ses lèvres; non sans y gagner quelques morsures. Une bonne partie du liquide qu'elle recrachait se déversait entre ses seins. J'ai maintenu ma prise et continué à verser l'alcool jusqu'à ce que d'épuisement elle en avale enfin une grande partie.


Après avoir lavé son corps comme je pouvais et attendu que l'alcool fasse un peu de son effet, j'ai repris ma position sur elle. Groggy, elle bougeait à peine, ne manifestait plus aucun signe de lucidité. J'aimais ces premières minutes, seule avec mon vice. Ma gorge se serrait, anticipant sur la jouissance alors que je commençais par une estafilade légère, incisée en diagonale dans son derme, comme pour une pelure d'orange. A la première goutte de sang, je léchai la perle, frottais un peu de mon visage sur sa peau, et reposai là un instant, contemplant les moments qui se promettaient à moi. Puis mordant mes lèvres un peu trop profondément, je continuai par une ligne plus directe et plus grande. Elle débuta du creux de ses épaules vers son flanc droit. Je passai le doigt le long des rebords irréguliers de la coupure, j'échancrai de-ci de-là du bout de la pulpe. Alors que je m'abandonnais à mon souffle malin, ma langue exprima ma délectation en passant sur mes canines. Je m'abattis comme une armée sur la chair, léchai d'un coup de langue félin et meurtrier, tout le pan droit de son cou. Enserrant sa gorge d'une main, je dessinai une déchirure verticale de son épaule gauche jusqu'à la base de son dos. L'humidité qui gagnait entre mes cuisses achevait d'encourager mon ardeur. Quelques écorchures suivirent. Nettes, rapides et antipathiques. Je m'arrêtai considérant le vide entre les rainures sanglantes.

Attrapant la deuxième bouteille d'alcool de riz, j'en versai une trainée le long d'une balafre choisie. Réveillée par la douleur cuisante, j'entendis, lointain, le hurlement fendre l'air et le tapage du corps révolté. Sans cérémonie, je versai une autre bavure de liqueur et entendis, plus confusément, le cri déchirant, mourant comme un appel. Ce qui ne m'empêcha pas de répandre à nouveau l'alcool sur un autre sillon. Au contraire. A présent que mon oiseau lâchait ses sanglots, j'arrivais vers une possessive volupté, et j'en sentais la vibration s'épaissir à chaque plainte tremblante, dans mon cœur, mon ventre et mon sexe. 
 
Reprenant mon outils, je présentais d'abord la face de la lame refroidie à sa joue. Puis au comble de ma joie, je repris ma besogne, accompagnée dans ma poitrine par les ravages de ses cris. J'aimais particulièrement le tressautement de ses pleurs quand je calmais mes ardeurs, puis que tout à coup j'allongeais la longueur de ma strie. Presque émue, je l'embrassai sur une joue, et entrepris de nettoyer les dégoulinures rouges avec ma langue. Elle pleurait encore, reniflant, suppliante. Je continuai alors entre les prières à ciseler dans sa chair, jusqu'à ce que le silence retrouva sa place.

Séduite par un nouvel élan, je pris le tisonnier resté dans les braises.  Et debout, sans ménagement, j'en appliquai le bout effilé sur sa fesse. Démunie par la douleur, un hurlement se brisa bestialement avant de se s'effondrer à nouveau dans le silence. A demi-évanouie, je la ranimai avec le roseau. Je fouettais abusivement, son dos, ses fesses. Il monta peu à peu dans la pièce - qui me paraissait maintenant immense, le braillement régulier et épuisé de ses protestations. Il ne cessa qu'à mon propre épuisement. 
Mouillant alors mes doigts j'entrepris de fouiller dans les renfoncements de ma féminité et de terminer le plaisir rencogné dans les parois de mon sexe. Dépassée par ma propre convulsion je m'effondrai sur son corps ruiné.

Un ange est passé. Le glapissement de la faune dehors me renvoya à l'aube. Et je découvris son dos entièrement ouvragé. Sur sa peau grêlée tombaient quelques rayons venus du volet. Ils semblaient témoigner un peu de leur compassion. Dans la pénombre, j'attrapai mon phallus sophistiqué. J'ajustai plus lâchement les liens à ses jambes et vérifiai au passage la bonne tenue des autres. Encore défaite dans sa léthargie, je vins la taquiner abruptement, écrasant sous son nez et forçant sa bouche à accepter mon nouvel instrument de vinyle. Puis revenant à genoux vers son cul, je remontai solidement ses hanches, et laissant couler un filet de bave par plaisir accessoire, j'emboutis son con déjà ouvert par ces quelques heures du matin. Elle lâcha un gémissement intense. Et je commençai à la fourailler vigoureusement. 
Après quelques allers, elle fut surprise par un premier orgasme, gourmant et chevrotant. A la fin de celui-ci, cessant mes approches répétées dans son sexe, je vins debout devant elle. Puis me laissant tomber accroupie, je levai son visage devant le mien, et la giflai subitement. Retournant à ma place, j'attrapai au passage le harnais, m'en ceignais les hanches, et repris mon activité, cette fois à coups de reins.

Assujettie à ma bride, elle tentait d'enrayer dans sa voix quelques hoquets et spasmes confus. Elle étouffait entre cette lutte et la poussée d'un nouvel appétit. Elle libéra finalement dans des râles excessifs le surplus de concupiscence qui venait gratter toujours plus profondément en elle. Je bourrai alors plus loin, ne trouvant bientôt plus le fond de ce trou avide. Saisissant à la hâte les ciseaux, je coupai ses liens, et la tournai sur la dos afin qu'elle me présente les dédales gonflées de son sexe et la cavité dévorante. Plaçant sa jambe sur mon épaule, je la pénétrai despotiquement. Puis, obsédée, par son visage larmoyant, je la fis languir par des glissades moins franches. Je regardai travailler mon œuvre sur sa bouche et ses yeux papillonnants dans le délire de la baise. Enfin, je récidivai mon châtiment de pénétrations carrés. Et sa bouche ouverte, possédée par l'effervescence qui grouillait de son sexe à sa gorge, se remit à pousser des agonies inlassables. Je pressai alors deux doigts sur son clitoris, et la masturbai lestement. Ses gémissements s'envolaient dans une complainte bruyante et difficile, alors qu'aux bords de jouir je continuais à m'engouffrer en elle. Elle m'attrapa à la gorge, submergée par son plaisir, et, accompagnée du mien, nous avons toutes deux été sidérées par l'affluence et le déchaînement de la jouissance.

A peine reposée, je me relevai, jetant un œil sur son corps éparpillé. Encore engourdie par la fatigue, je la retournai, face contre le drap, face aux tâches rouges laissées par ses écorchures. Je rattachai deux liens à ses poignets. Puis, mollement, très mollement, je retrouvai sur ma table mes quelques ustensiles. Je pris la bougie blanche, et allumai la mèche. Contemplant au travers de cette gueule de bois charnelle, la vivacité de la flamme.  Je revins m'asseoir, cul nu sur ses jambes, et retenant un instant mon geste, je déversai la cire bouillante sur son dos scarifié. Des abysses éteint de sa rébellion, vint un long cri, un long pleur. C'était la matinée. Nous étions seules, et les essences du jardin chauffé par le soleil, commençaient à affluer dans la pièce alors que je continuais à déverser la cire brûlante sur ses blessures.  

dimanche 24 mars 2013

Scène 25 - La Nuit de Vénus ( partie I )

J'ai regardé le feu rougeoyer dans son ombre. Dehors la nuit brune nous bouclait à demeure. L'air appesanti par l'humidité de la campagne ralentissait les lumières, les insectes,  les araignées.  J'entendais fricoter les braises, alors qu'immobile je faisais mon possible pour graver dans ma mémoire, les chimères ondoyantes dans sa chevelure aux mèches capricieuses. 

J'étais sa nuit. Quand elle montait sur son podium, offerte à tous, qu'elle brillait, je savais qu'elle viendrait s'éteindre contre moi. Elle n'aimait pas son nez, trop plat, ou trop là. Ni sa bouche sévèrement critiquée comme étant épaisse et vulgaire, qui se tordait dans des sens qui ne lui plaisaient pas. Elle tirait sur ses oreilles, grimaçait comme un bouddha. Elle n'aimait pas, non plus, l'absence de symétrie entre ses yeux. Qu'un œil dévoila son chagrin et que l'autre déborda de colère. Elle ne savait pas, elle n'arrivait, pas, à choisir lequel il fallait (re)garder. 

Un jour je l'ai trouvée dans la salle de bain, sur le carrelage, triste. Les larmes aux bords des deux yeux cette fois, la morve plein le nez. Elle m'a dit qu'elle avait été trop sage, trop sage quand elle était jeune, et qu'à présent elle ne pouvait plus faire autant de bêtises, que ce temps là était fini. Que le temps c'était pourri. C'était une femme-enfant. Et ça me brisait toujours un peu d'assister impuissante aux étapes de son innocence. C'était moi le vieux à présent. Un jour on devient le vieux. C'est comme ça. Et quand je consolais sa part d'enfant j'avais toujours un peu l'impression de jouir sur un rapport incestueux. Je crois que cela lui plaisait aussi de baiser parfois ce qui pouvait ressembler à sa maman.

Alors que l'activité du feu a augmenté, je me rappelle m'être glissée dans ses cheveux. J'ai écarté doucement la plaine ondulante de pailles et d'or. Sur mes lèvres sa peau brûlait des essences de bois. Je lui ai donné un autre baiser, quand sa tête tombante sur le côté, m'a dévoilé l'arête plongeante vers le creux de son épaule. Mon baiser sur sa peau bouillante a cautérisé la plaie qui ronge. Le désir. 

Elle a tourné son visage vers moi. M'a regardée avec ses yeux, qu'elles n'aimaient pas. Mutine, puis animée par un sourire de dieu pan, elle m'a embrassée. Et ce baiser qui a claqué avec une braise mourante, a été pour moi le souvenir de beaucoup d'autres. De cette nuit là.